Revue de presse

"Lydia Guirous : #Je suis Marianne" (J.-P. Brighelli, causeur.fr , 20 juin 16)

"Entretien avec l’ex-porte parole des Républicains", par Jean-Paul Brighelli. 29 juin 2016

"C’est donc le dernier livre (paru en janvier, oui, je sais, je date, mais bon, tant de sollicitations…) de Lydia Guirous, éphémère porte-parole des « Républicains », virée pour cause de langue bien pendue. À tel point que Luc Le Vaillant, qui est à peu près le dernier à ne pas penser courbe chez Libé, en arrive à la plaindre.

À tel point aussi que Yann Moix, le sémillant roquet de la Pensée Unique et du Bien réunis, a cru intelligent de l’agresser sauvagement quand elle est passée à On n’est pas couché.

Pour mémoire, Lydia Guirous avait écrit il y a deux ans Allah est grand, la République aussi — et le parallèle entre Allah l’Incomparable et la Gueuse, comme disent les ultra-cathos, lui a amené quelques tombereaux d’insultes et de menaces.

Plutôt que de vous faire l’article, je l’ai interviewée sur les sujets les plus brûlants. Comme quoi on peut être (de culture) musulmane et ne pas dire d’énormités.

JPB. « L’islam radical tue parce que nous sommes heureux », dites-vous au tout début de votre livre : pourriez-vous définir le bonheur d’être Français ?

LD. Le bonheur d’être Français c’est avant tout le bonheur d’être libre. Libre d’aller et venir, libre de s’exprimer, libre de choisir sa vie professionnelle et personnelle. C’est également le bonheur de vivre dans l’égalité, égalité entre les hommes et les femmes bien sûr, mais également égalité devant la loi, égalité devant le savoir et la culture grâce à l’école républicaine. Enfin le bonheur d’être Français, c’est également avoir la certitude de vivre dans une société dans laquelle la fraternité n’est pas qu’un simple mot et dans laquelle la solidarité nationale accompagne chaque citoyen de manière bienveillante comme dans les services publics par exemple. L’hôpital public est l’illustration la plus parfaite de la solidarité à la française, où tout le monde peut-être soigné quelque soit sa condition sociale, ses moyens et ses orientations politiques ou religieuses. Cela semble une évidence, pourtant si l’on se compare à d’autres pays, c’est surtout une chance qu’il faut préserver comme un trésor.

Après Charlie, vous avez appelé les Musulmans de France à manifester — ce qui vous a valu « un flux interminable d’insultes, de menaces, de violence, d’appel à la haine ». Il y a donc une France qui « est Kouachi, qui est Coulibaly » ? Qu’avons-nous raté pour que tant de jeunes s’identifient à des assassins ?

Oui, j’ai reçu des menaces et des insultes et j’ai fait condamner récemment en Correctionnelle un jeune de Créteil qui me harcelait sur les réseaux sociaux et voulait me tuer. C’est mon quotidien malheureusement et je dirais que c’est le quotidien de tous ceux qui n’ont pas peur d’affronter la réalité et de dénoncer la montée en puissance d’un islam politique qui veut tuer la France et la République. Moi je ne suis pas dans l’islamophilie béate comme certains médias et une bonne partie de la gauche communautariste. L’Islam radical (et j’inclus naturellement les salafistes et les Frères Musulmans dans cette appellation) a pris en otage les Français de confession musulmane et est en passe de gagner la bataille des idées. L’omerta serait la pire des réponses. Les Français de confession musulmane après ces périodes d’attentats islamistes doivent clairement montrer leur attachement à la République et à la France, sans ambiguïté, sans faux-semblants, comme toute personne qui aime son pays, sa culture et ses valeurs. Le discours qui consiste à dire « ça n’a rien avoir avec l’Islam » est inaudible et de moins en moins crédible. Les attentats n’ont rien avoir avec les Français de confession musulmane, c’est vrai, en revanche qu’ils n’aient rien avoir avec l’Islam, c’est beaucoup plus discutable. Ce que je voudrais, c’est un mouvement général des Français de confession musulmane qui expriment clairement l’idée : nous sommes Français d’abord, musulmans après.

Quant à la deuxième partie de votre question, je crois qu’il faut arrêter de se culpabiliser en permanence : la France n’a rien raté ! Elle a su accueillir dignement tous ses immigrés (à l’exception notoire des harkis et des chibanis que l’on a mis trop longtemps à reconnaître), leur donner du travail, un toit, des écoles, des médecins… C’est ce que je rappelle dans mon dernier livre « Je suis Marianne ». Oui Marianne éduque, protège, soigne, accueille et il n’y a pas plus généreux que la France. Si une poignée d’ahuris se radicalisent et deviennent violents, ce n’est pas une raison pour se remettre en question. Il faut juste les sanctionner lourdement au premier dérapage. La fin du laxisme des politiques pénales serait je pense de nature à stopper cette radicalisation des comportements.

Comment éviter le repliement identitaire, l’entre-soi, le repliement sur le ghetto ?

Il faut appliquer nos lois avec plus de sévérité (par exemple la loi sur la burqa), étendre le champ de loi de 2004 sur l’interdiction du voile à l’université et aux entreprises ; corréler le respect de nos valeurs et de nos principes à l’attribution des aides sociales, stopper la construction anarchique de mosquées, interdire les menus de substitution dans les écoles publiques car on ne classe pas les élèves en fonction de leur religion… Bref il faut se respecter, respecter notre histoire, notre culture, notre identité, pour que tout le monde la respecte comme il se doit. Il ne faut rien céder.

« C’est mon choix », disent les femmes qui portent des vêtures islamiques. Est-ce si sûr ? Quelle est votre position de femme sur ces signes extérieurs de servilité et d’infériorité ?

Je me suis longuement exprimée sur ces sujets dans mes deux derniers livres : le voile est à la fois un instrument de soumission des femmes et un instrument de prosélytisme religieux pour servir les idées nauséabondes de l’Islam politique. Les femmes qui portent le voile sont les marionnettes des salafistes et des Frères musulmans. Elles portent le voile pour s’acheter une respectabilité alors qu’elles se construisent une prison. Mais de toute façon la question, n’est pas là, libre ou pas de le porter…ça c’est une réflexion de bobos et de médias. Pour moi, le voile ne correspond pas à l’identité culturelle et politique de notre pays, la France.

« La France se meurt de sa naïveté » — belle formule : mais encore ?

La France est la victime collatérale de la pensée relativiste et multiculturelle de la génération de mai 68. Pour se donner bonne conscience, certains ont cru bon de sacrifier notre histoire, nos valeurs et notre culture. Quand on parlait d’immigration, on nous traitait de racistes, quand on parlait d’islamisme, on nous disait que nous étions islamophobes (alors que finalement nous étions les seuls à ne pas faire d’amalgame entre les musulmans républicains et les islamistes), quand on parlait de mérite et de travail, on nous qualifiait de réacs ! La pensée unique a nié la réalité de notre pays et la souffrance du peuple, bien trop occupée à garder sa zone d’influence dans les médias. Aujourd’hui nous en payons le prix fort : crise identitaire, islamisme et Front National aux portes du pouvoir.

Les « accommodements raisonnables » amènent la RATP, dites-vous, à changer de bus au changement d’équipe afin que des chauffeurs musulmans ne prennent pas un volant contaminé, si je puis dire, par leurs homologues féminines. En même temps l’Observatoire de la laïcité de Jean-Louis Bianco propose d’aménager la laïcité — dont vous dites vous-même qu’elle est « un principe non évolutif ». Dans quelle mesure ces compromissions avec des superstitions d’un autre âge sont-elles un danger pour la France — et pour l’Occident en général, parce que les « accommodements » sont bien pires outre-Manche, par exemple ?

Ce n’est pas parce que c’est pire ailleurs qu’il ne faut rien faire et tout accepter. La RATP est une entreprise publique en charge d’une mission de service public, les revendications religieuses ne doivent pas pouvoir s’exprimer en son sein. Ceux qui ne veulent pas conduire après une femme doivent être licenciés pour faute grave. Concernant Jean-Louis Bianco et l’observatoire de la Laïcité … comment lui donner une quelconque crédibilité après qu’il a déclaré « Il n’y a pas de problème de laïcité en France » ? [1]

Certains élus, dites-vous, brisent le pacte républicain par clientélisme électoral, important en France des pratiques multi-culturelles qui sont l’apanage des pays anglo-saxons. Est-ce bien la culture de la République ?

Non, ce n’est pas la culture de la République. La France a toujours été un pays multi-ethnique, mais jamais un pays multi-culturel. Notre culture, tout comme notre communauté, est unique et elle s’appelle la République. N’en déplaise à certains, chez nous on vit les uns avec les autres et non les uns à côté des autres.

Vous avez écrit votre livre avant les attentats de novembre dernier — et vous y dénoncez l’angélisme et le déni de la gauche face à la montée du communautarisme religieux. Les choses ont-elles changé depuis sept mois ? Au passage, n’y a-t-il pas des gens de droite qui font eux aussi de petits calculs électoralistes à courte vue — y compris parmi les candidats à la primaire au sein des Républicains ?

À gauche, rien n’a changé, il y a juste un discours de façade un peu plus agressif… Mais rappelez-vous que Manuel Valls après Charlie et l’Hyper Casher trouvait des excuses sociales aux terroristes ! Finalement il renvoyait la faute sur nous, ce qui est plus que scandaleux. La gauche se complaît dans le communautarisme et particulièrement le communautarisme islamique car elle y voit de manière cynique des électeurs acquis à sa cause, qu’il faut brosser dans le sens du poil et à qui on doit céder à la première revendication. Incapable de garder l’électorat ouvrier qui a fui vers le Front National, la gauche se réfugie vers de nouveaux « prolétaires », les musulmans des banlieues, quitte à mettre en place une société communautarisée. Quant au fait qu’il y ait eu du clientélisme dans nos rangs à droite et du relativisme sur ces questions… c’est vrai, mais je vous ferai observer que François Hollande est au pouvoir depuis 4 ans et que la menace islamiste n’était pas la même avant 2012. La France a changé.

Comment expliquez-vous l’irrésistible montée du FN ?

Le communautarisme et le multiculturalisme mielleux de la Gauche y sont pour beaucoup… A cela vous ajoutez le chômage endémique et la trahison du peuple et de l’électorat de gauche de 2012 par Hollande et Valls et vous obtenez un début de réponse… Le FN c’est 10 points sous Mitterrand, 10 points sous Jospin, 10 points sous Hollande !

Vous dites que nombre d’imams radicaux sont antisémites. Mais enfin, c’est un délit ! Pourquoi n’applique-t-on pas la loi ?

Pour ne pas stigmatiser sans doute, comme disent les socialistes ! Ce pays est en faillite d’autorité. Il nous faut de nouveau un Président expérimenté aux commandes de la France. Un Président sans ambiguïté face à la menace de l’Islam radical et qui défende notre identité, notre histoire et nos valeurs.

Face à l’islam extrémiste, « les féministes sont aux abonnés absents ». Comment expliquez-vous cette cécité volontaire ?

Le féminisme depuis plusieurs années n’est plus là pour défendre les femmes mais pour servir la soupe au PS et faire la claque dans les meetings ou dans les défilés. Elles se mobilisent pour Malala [Yousafzai] et les jeunes filles enlevées par Boko Haram, ce qui est un bonne chose, mais pour les Malala de nos quartiers elles préfèrent pratiquer la politique de l’autruche ! Alors naturellement pour ces féministes, il est plus important de défendre le multi-culturalisme et le relativisme à travers le voile que de défendre la pauvre fille qui se fait tabasser le soir en rentrant chez elle parce qu’elle a refusé de le porter… . C’est un féminisme couard, petit-bourgeois et finalement raciste et néo-colonial, à l’image de la gauche. Quelle régression !"


Lire aussi la note de lecture L. Guirous : La laïcité divise aussi la droite ! par Patrick Kessel (note du CLR).


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