Association des libres penseurs de France

"La laïcité ouverte de Mgr Pontier", président des évêques de France (ADLPF, 23 mai 14)

24 mai 2014

"Mgr Pontier, Président des évêques de France, a été interrogé par l’Observatoire de la laïcité. Son intervention mérite qu’on l’analyse car elle montre très clairement ce qu’entendent par laïcité les religieux.

Pour lui, il y a « une évolution ou une hésitation entre une « laïcité d’État » et une « laïcité de la société ». La première option de la laïcité c’est celle prévue par la loi du 9 décembre 1905 qui consistait en la séparation et non pas en l’ignorance. Mais ce concept a évolué d’une toute autre manière au cours du XXIe siècle ».

Mgr ignore que la loi de 1905, dont il se réclame, dit que [« La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. »] [1] Ne pas reconnaître est-ce synonyme d’ignorer ? De plus, de Sarkozy à Valls, qui a été à la canonisation de deux papes, le moins que l’on puisse dire c’est que la loi de 1905 n’est plus respectée. Les élus, dans le cadre de leurs fonctions, font de plus en plus allégeances aux religions en se rendant à leurs cérémonies d’où ils font des discours vantant les mérites des religions.

Mgr Pontier ose dire qu’au XXIe siècle la société devient de plus en plus laïque, dans quel pays vit-il ? C’est tout le contraire ! Il dénonce « la laïcisation de la société et la relégation des convictions religieuses à la sphère privée et intime », alors qu’on subit les prières de Civitas dans l’espace publique et la censure au nom de la religion… Ainsi l’affiche de cinéma Au nom du fils a été modifiée pour ne pas déplaire aux croyants [2]. La liberté d’expression est ainsi bafouée au nom de la religion.

Cela ne dérange pas Mgr Pontier, qui à aucun moment ne dénonce Civitas, Madame Boutin, ou les méfaits des intégristes. Bien au contraire, il dénonce les « personnes qui ont du mal à comprendre que l’Église se positionne sur les questions de société ». Démontrant ainsi l’alliance objective entre les factieux intégristes et l’Église officielle.

Les religions peuvent donc, elles doivent même, gérer les affaires de la cité, y compris en matière de mœurs et constituer des partis politico-religieux, alors que l’État devrait, quant à lui, rester dans une stricte neutralité par rapport aux religions : ni ingérence ni contrôle.

Religions partout : laïcité nulle part

Mgr Pontier dit respecter la loi de 1905, ce qui ne l’empêche pas de se nourrir des nombreuses subventions publiques votées par les collectivités territoriales. Ce sont des centaines de milliers d’euros (d’argent public, provenant des impôts de tous) qui sont versés chaque année aux cultes. Ce qui est contraire à la loi de 1905, faut-il le rappeler.

Plus loin, il parle, en substance, d’[une] laïcité de combat [qui renvoie la religion] à l’obscurantisme, qui est favorable à des révisions, [...] notamment [de] la loi Debré avec le slogan « argent public école publique » pour instaurer des coupures radicales et ramener la République à plus de rigueur. Quelle hypocrisie ! La loi Debré est postérieure à la loi de 1905 et elle est en complète contradiction avec ses principes de non financement des cultes par la puissance publique. Or, les écoles catholiques sont bien confessionnelles ! et n’entrent pas dans le cadre de la loi de 1905, mieux, elle le débordent ! Pourtant, il demande à l’État de payer.

Bien sûr, ajoute-t-il, il faut garder les jours fériés à connotation religieuse. Et il ne faut pas que « les religions ne soient qu’une affaire personnelle, individuelle, alors qu’elles jouent un rôle social. (…) Il arrive que lorsque nous organisons une activité avec des jeunes, les caisses d’allocations familiales nous refuse[nt] de nous subventionner parce qu’un temps est prévu pour une messe ».

En résumé la laïcité promue par Mgr Pontier implique que l’État finance les religions pour toutes leurs activités, leurs écoles, leurs lieux de cultes. Que les politiques donnent plus de place aux religions et les reconnaissent, qu’elles soient plus visibles dans l’espace public. Pour lui, les religions doivent être entendues, et écoutées, y compris sur les questions politiques et sociétales.

L’Église souhaite nous faire revenir en arrière, on le constate en Espagne, par exemple, où le droit à l’avortement est remis en question par la droite religieuse. Car, l’idéologie religieuse c’est la remise en question de la liberté sous toutes ses formes. Qu’au nom du respect dû aux religions, la liberté d’expression soit contrôlée, personne ne devant plus critiquer les religions. Mgr Pontier ne défend que sa chapelle. En clair, Mgr Pontier voudrait que l’on vive dans un pays où les religions seraient des institutions cogérant la société avec l’État tout en arguant qu’elles lui sont supérieures. Bref, un état concordataire, comme en Alsace Moselle. [...]

Attaque en règle des athées

S’il y a une chose que les religions ne peuvent pas supporter c’est bien les athées et l’athéisme. Mgr Pontier ne peut pas s’empêcher de dire à la fin de son intervention sans le nommer (on reconnaît bien là les discours hypocrites des religions faits de sous entendus) que « ce ne sont pourtant pas les idéologies religieuses qui ont commis les deux grands drames du XXe siècle… », ignorant sciemment les autres siècles tout de même entachés par les guerres de religions, les croisades et l’Inquisition. Ajoutons que ce XXIe siècle n’est pas en reste, on s’y entre tue ou on assassine au nom de Dieu en Irak, au Soudan, au Mali, en Centrafrique, au Nigeria, en Égypte, en Syrie etc.…

Mais le plus grave c’est son insinuation : l’athéisme serait l’idéologie criminelle par excellence. Or, Hitler a toujours dit qu’il « était le sauveur de l’Allemagne » comme Jésus était « le sauveur de l’Humanité ». Hitler a toujours dit que c’est « la Providence » qui le guidait. Sur les boucles de ceinturons des soldats allemands il était écrit : Got mit uns, « Dieu avec nous », la propagande nazie reprenait les écrits du protestant Martin Luther pour justifier sa haine des juifs. Hitler était donc une sorte de croyant, certes paganisé, et tenait un discours à caractère religieux ! Quant à Staline, il fut élevé par des prêtres et voulait devenir membre du clergé [...].

Régis Boussières"

Lire " La laïcité ouverte de Mgr Pontier".


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