Revue de presse

M. Onfray : "Le tribal fait désormais la loi" (marianne.net , 24 nov. 14)

26 novembre 2014

"Le philosophe [...] estime notamment que définir "la laïcité comme respect de toutes les religions" serait une erreur car cela ouvrirait "la porte aux surenchères religieuses". D’autant plus qu’il serait, selon lui, "dans la nature de l’islam d’être prosélyte et conquérant".

Marianne : Il semble de plus en plus difficile de s’affirmer athée…

Michel Onfray : La chute du mur de Berlin en 1989 a laissé orphelins ceux qui croyaient à la possibilité d’un paradis sur terre. Le christianisme, le marxisme, le freudisme, fonctionnaient comme des idéologies clés en main. Avec leurs disparitions, le besoin de croire a réinvesti la religion par laquelle, sans grands frais intellectuels, on dispose d’une vision du monde carrée, simple, claire et nette. La foi permet de faire communauté assez facilement dans un monde où le tribal fait désormais la loi.

Mais alors, le succès de votre Traité d’athéologie ne constitue-t-il pas un paradoxe ?

Non, car quelques-uns refusent le choix entre judéo-christianisme et islam. Nombre de personnes veulent avoir le choix entre dieu et pas dieu. Mais l’idéologie dominante est au service des trois monothéismes : quiconque se dit clairement athée prend le risque de se faire traiter d’antisémite par des juifs, d’islamophobe par des musulmans ou partisan du blasphème par des chrétiens… Mon Traité d’athéologie a été l’occasion pour les oubliés de l’idéologie dominante de se retrouver sous le signe d’une même raison critique.

Les représentants religieux sont sollicités sur toutes les questions, au contraire des athées, qui ne sont même pas représentés dans les comités d’éthique…

Les comités d’éthique sont composés par les pouvoirs de façon à obtenir le résultat escompté, qui est d’extrême prudence, de grande circonspection, donc de conservatisme. Avec eux, il est toujours urgent d’attendre sous prétexte de principe de précaution… Quand on choisit un non-religieux pour siéger au comité d’éthique, la plupart du temps il s’agit d’un franc-maçon, qui incarne souvent le cléricalisme chrétien dans sa version laïque…

Que signifient pour vous les rapprochements que l’on observe entre chrétiens et musulmans sur les questions sociétales ?

Désormais, il apparaît enfin au grand jour que les monothéismes sont plus frères que frères ennemis. Face aux avancées sociétales qui se révèlent vraiment postchrétiennes (avortement, contraception, mariage homosexuel, GPA, PMA…), elles constituent un front commun pour lequel l’ennemi, c’est toujours l’athée !

Faut-il, comme certains le proposent, redéfinir la laïcité comme respect de toutes les religions ?

La laïcité comme respect de toutes les religions, c’est la porte ouverte aux surenchères religieuses. Il n’est pas dans la nature du judaïsme d’être prosélyte, on naît juif ou on ne l’est pas. Le christianisme n’a plus les moyens d’être prosélyte – encore qu’il reprenne du poil de la bête avec les succès engrangés par l’islam, ce qui lui donne des idées…
En revanche – je renvoie à la lecture du Coran, pas à l’ouï-dire médiatique sur l’islam, mais au Coran et à sa lecture plume à la main –, il est dans la nature de l’islam d’être prosélyte et conquérant. Que les médias le veuillent ou non, c’est dans le texte, confirmé par les hadith et la biographie du Prophète.
A quoi bon une laïcité respectant toutes les religions face aux revendications théocratiques consubstantielles à l’esprit prosélyte ? « Ouverte » ou « fermée », la laïcité n’est plus l’instrument qui permettra aux démocraties de subsister face à ceux pour lesquels elle n’est pas une vertu, mais le vice même. L’histoire se fait avec les minorités agissantes, pas avec les majorités silencieuses.

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