Revue de presse

"Laïcité éruptive" (G. Biard, Charlie Hebdo, 1er av. 15)

3 avril 2015

Laïcité "[...] Chacun aménage le concept à la façon qui l’arrange, l’instrumentalise, le détourne de son sens, le pervertit, pour en faire un outil de propagande bien éloigné de sa fonction première, qui est de permettre la liberté d’expression et de conscience des citoyens, d’établir une stricte séparation entre l’Etat et le divin, et, autant que possible, de tenir les cultes à l’écart du pouvoir politique.

Cycliste compulsif, toujours soucieux de se se retrouver à la tête du peloton du moment, l’inégalable Nicolas Sarkozy, après avoir voulu accommoder la laïcité à la sauce "positive", en propose désormais une version "riche", destinée à promouvoir le gras du jambon dans les cantines scolaires. [...] "Si vous voulez que vos enfants vivent la religion de ses parents, la République dans sa grande sagesse a prévu un enseignement confessionnel", a-t-il rétorqué à un père de famille sur RTL. La laïcité consisterait donc à envoyer les enfants dans des écoles religieuses. Sans rire.

Du côté du Front national, on parle aussi beaucoup de laïcité [...]. La chose est pour le moins étonnante, venant d’un parti attaché aux "racines chrétiennes de la France" et dont les élus s’obstinent à installer des crèches de Noël dans les bâtiments publics... [...]

A l’inverse, il y a tous ceux, nombreux et divers, qui considèrent que la laïcité est beaucoup trop intrusive et doit être assouplie, voire carrément jetée dans les poubelles de l’Histoire, car elle serait un instrument d’oppression et de "stigmatisation", un archaïsme liberticide au service d’une pensée néocolonialiste. Les mollahs iraniens, les monarques du Golfe, les talibans et les égorgeurs de Daech seraient les nouveaux damnés de la Terre, tandis que le voile des femmes et la barbe du Prophète seraient outil d’émancipation.

Et, au milieu de tout ce fatras idéologique, pris en otage entre fantasmes identitaires et recyclage sous acide d’idéaux révolutionnaires, il y a tous les citoyens que l’on a définis d’autorité comme appartenant exclusivement à la catégorie "musulmans", sans souci qu’ils soient athées ou croyants, et qui ne voient plus la laïcité que comme une arme idéologique qu’on leur braque sur la tempe en les sommant de s’y soumettre ou de s’en dégoûter.
Si l’on veut éviter de foncer droit à la catastrophe, il est temps de faire un peu, voire beaucoup, de pédagogie. Et d’expliquer, sereinement mais sans ambiguïté, que la laïcité n’est pas seulement une loi, c’est aussi une idée, un outil de liberté et d’égalité qui n’est pas réductible à des gesticulations opportunistes ou à des élucubrations fumeuses, et l’une des clefs de voûte de notre édifice social."


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