Revue de presse

L’uniforme, « les écoles volontaires pourront le tester » : "les premiers pas de Gabriel Attal à l’Éducation nationale" (Midi libre, 28 juil. 23)

(Midi libre, 28 juil. 23) 30 juillet 2023

[Les éléments de la Revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"EXCLUSIF. Plan de lutte contre le harcèlement, promesse d’un enseignant devant chaque élève, calendrier du bac, rénovation thermique des écoles, restauration de l’autorité des enseignants : Gabriel Attal a balayé en exclusivité pour Midi Libre tous les gros dossiers lors de sa première interview en tant que ministre de l’Education, à l’occasion de son déplacement dans l’Hérault, à Castelnau-le-Lez puis au Crès.

Richard Gougis

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Lire ""Les écoles volontaires pourront tester l’uniforme" : chantiers, premières mesures... Gabriel Attal dévoile sa feuille de route".

Vous venez dans le cadre de la rénovation thermique des établissements. Quel est votre plan en la matière ?

Le cadre de vie quotidien de nos élèves sera prioritaire dans la politique que je conduirai. La rénovation de nos écoles est capitale pour la survie de la planète et pour la vie de nos élèves ; notamment car il y a trop d’établissements où ils ont chaud l’été, froid l’hiver. L’objectif fort qu’on se fixe sur ce quinquennat c’est de doubler le nombre de rénovations financées par l’Etat. Pour cela on va mettre des moyens inédits. La Première ministre a annoncé une augmentation du budget pour l’écologie de 7 milliards d’euros l’an prochain, dont plusieurs centaines de millions d’euros pour les écoles. Cela va nous permettre notamment de rénover en masse en complément des collectivités locales et donc de rendre possibles certains projets qu’on n’arrivait pas à financer. On a besoin de l'engagement de tous et je veux saluer ici le maire de Castelnau-le-Lez Frédéric Lafforgue et son équipe qui ont fait un travail admirable autour de ce projet du Groupe Scolaire Jacques Chirac.

La chaleur dans les écoles l’été amène la question des calendriers et de vacances scolaires que le président souhaite raccourcir. Comment allez-vous gérer ce dossier ?

Ma marque de fabrique, c’est le dialogue et je veux le mener avec l’ensemble de la communauté éducative. Ce chantier de longue haleine se conjugue avec un autre axe de travail sur la reconquête du mois de juin et du troisième trimestre, notamment pour les lycéens. Avant même d’avancer sur les vacances, il faut reconquérir les mois de scolarité qui, malheureusement, pour différentes raisons, sont parfois désertés par certains élèves.

Sur ce calendrier du bac. Quelle est l’option qui se précise ? Maintenir les épreuves anticipées en mars ou tout reprogrammer en juin ?

Il y a plusieurs possibilités. J’annoncerai ma décision à la rentrée après avoir recueilli l’avis de la communauté éducative notamment les recteurs et des organisations syndicales. Mon souhait c’est que les élèves soient motivés et assidus jusqu’au bout de l’année scolaire. Mais je souhaite aussi que les éléments déterminant l’affectation dans le supérieur conservent une dimension nationale. Je veux que les familles, les élèves et les professeurs y voient clair rapidement.

La rentrée et cette promesse d’avoir un professeur devant chaque classe... Pourrez-vous la tenir alors qu’on évoque un déficit de 3000 enseignants après concours ?

C’est le cœur de mon combat pour l’école. Et nous y arriverons. Un très gros travail a été réalisé pour préparer cette rentrée. On a pourvu cette année plus de postes aux concours qu’en 2022 donc on a progressé sur la question. Mais c’est évidemment un sujet de préoccupation majeure. Et on continuera à progresser sur la reconnaissance du métier enseignant, notamment grâce aux augmentations de salaires historiques à la rentrée.

Comment renouveler le vivier de remplaçants ? Allez-vous recruter plus de contractuels ?

C’est une urgence nationale : aujourd’hui, dans certains endroits, un élève peut perdre autour d’un an sur l’ensemble de sa scolarité en raison d’absences non remplacées. Je sais que les enseignants sont fortement mobilisés sur cette question d’égalité des chances. Le Pacte enseignants va permettre des rémunérations importantes pour y répondre. Nous y arriverons ensemble.

Ce pacte enseignant, les syndicats y sont pour le moment opposés, estimant que les revalorisations sans contreparties sont insuffisantes, notamment en fin de carrière. Qu’allez-vous leur proposer ?

Nous ne pouvons plus nous contenter de déclarations d’amour aux enseignants. A la rentrée, nous leur apportons des preuves. Tous les professeurs gagneront au moins 120 € nets de plus par mois qu’à la rentrée scolaire 2022, sans condition. Ensuite, nous assumons d’aller plus loin, avec deux priorités. D’abord, des revalorisations massives sur les débuts de carrière : plus aucun professeur titulaire en dessous de 2000 euros par mois. L’objectif sera tenu. Et des revalorisations fortes pour les débuts de carrière qui iront de 170 à 240 euros nets en plus par mois pour les dix premières années d’enseignement. A ces revalorisations, que nous devions aux professeurs, pourra s’ajouter le fait de payer beaucoup mieux certaines missions complémentaires, que beaucoup d’entre eux assument déjà, comme les remplacements de courte durée ou l’aide aux devoirs.

Quelle feuille de route leur donnez-vous sur les enseignements ?

Ma priorité, ce sont les savoirs fondamentaux. On a encore trop d'élèves qui arrivent en 6e sans savoir lire, écrire, compter correctement. Pour mieux nous en assurer, nous allons désormais évaluer l’acquisition de ces fondamentaux en CM1 et en 4 e . C’est aussi la question de l'autorité et du respect des professeurs. C’est enfin celle du cadre de vie scolaire pour que l’école soit un lieu où nos enfants et nos enseignants sont heureux. Cela va des bâtiments et lieux de vie à la lutte contre le harcèlement pour laquelle notre réponse doit être implacable.

Que proposerez-vous de plus pour lutter contre ce fléau ?

Avant la rentrée, je vais prendre deux décrets importants. Le premier permettra le changement d’école d’un élève responsable de harcèlement plutôt que d’imposer ce changement à celui qui en est victime. C’est très attendu par les familles, c’est une mesure de justice. Ensuite, je donnerai la possibilité de prononcer des sanctions disciplinaires à l’encontre d’un élève à l’origine de cyberharcèlement à l’endroit d’un élève d’un autre établissement, ce qui n’est pas possible aujourd’hui. Je pilote aussi, à la demande de la Première ministre, un plan interministériel de lutte contre le harcèlement scolaire que nous présenterons à la rentrée.

Ça veut dire quoi réinstaurer de l’autorité au sein de l’école ?

D’abord il y a un état d’esprit qui me paraît évident, mais ne l’est malheureusement pas pour tout le monde. L’institution Education nationale doit être l’institution du respect de l’autorité, toujours en soutien des enseignants. Je serai donc en permanence à leurs côtés : leur autorité ne doit plus être bafouée par des élèves ou une très faible minorité de parents qui sont parfois dans un rapport de consommation ou insultent nos professeurs.

Concernant les tenues religieuses, notamment le port des abayas, quelle est votre position ?

Interrogé sur le sujet il y a plusieurs mois, j’avais déjà été clair : venir à l’école en abaya est un geste religieux, visant à tester la résistance de la République sur le sanctuaire laïque que doit constituer l’Ecole. Je n’ai pas changé d’avis et serai ferme sur ce sujet.

Faut-il réinstaurer le port de l’uniforme ?

Là aussi, j’ai toujours été constant : si la communauté éducative d’un établissement demande à l’expérimenter, par exemple dans le cadre du Conseil National de la Refondation, j’y suis favorable. C’est d’ailleurs déjà le cas dans certains établissements outre-mer. L’expérimentation est toujours utile pour faire progresser le débat, dans un sens ou dans l’autre. Mais je suis réaliste. Est-ce qu’on peut imaginer que ce serait une solution magique pour régler à elle seule tous les problèmes ? Je ne le crois pas.

Vous avez pris la tête d’un ministère très exposé et très difficile. Avez-vous hésité  ?

Lorsque l’on s’engage en politique, on ne cherche pas la facilité, on cherche à être utile et à agir pour son pays. Je pense à tous les Français qui se lèvent tous les matins et qui attendent beaucoup de l’école de la République. Des Français qui financent cette école avec leurs impôts et qui parfois doutent, se demandent si l’école de la République sera toujours en mesure d’apporter le meilleur à leurs enfants. Je veux que toutes les familles puissent garder foi dans l’école de la République.

Vous avez 34 ans, c’est une ascension fulgurante.

Etre ministre de l’Education nationale de son pays à 34 ans, c’est une responsabilité immense que j’accueille avec honneur et humilité. L’école est au cœur de la République. Quand on regarde tous les défis que traverse notre société, on en revient très souvent à l’école.

On parle déjà de vous à Matignon…

Ah bon… (rires). Je suis toujours fasciné par cette propension à faire des plans sur la comète. Je ne pourrais pas être plus heureux qu’à ma tâche au ministère de l’Education nationale et de la Jeunesse.

Votre prédécesseur Pap Ndiaye nommé ambassadeur auprès du Conseil de l’Europe, est-ce vraiment justifié  ?

Avant d’être nommé ministre, Pap Ndiaye a montré à quel point il était engagé pour l’intérêt général. Il apportera beaucoup au Conseil de l’Europe.

La grogne des policiers fait débat. Le chef de l’Etat a estimé que nul n’est au-dessus des lois. Tout le monde ne le comprend pas ainsi…

L’un de mes combats est le retour d’un plein respect de l’autorité dans l’école de la République. Je le mènerai au service des enseignants, des élèves, des parents. L’autorité, ce sont des règles. Je crois qu’il faut toujours faire attention à ne pas les fragiliser en donnant le sentiment que certains pourraient être au-dessus ou en dessous des lois.

Et clairement  ?

Le Directeur général de la Police nationale est un grand serviteur de l’Etat et le pays sait ce qu’il lui doit. Je n’ai pas compris les mots qu’il a employés sur la détention provisoire. Les policiers font un travail extraordinairement difficile, ils sont quotidiennement en première ligne, souvent provoqués. La République, elle tient par ses piliers : en particulier l’Ecole, la police, la justice. Si l’un d’eux donne le sentiment de remettre en cause la légitimité d’un autre, c’est tout l’édifice qui pourrait s’en trouver fragilisé."


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