Revue de presse

"L’Observatoire de la laïcité rouvre le dossier du Concordat" (la-croix.com , 6 oct. 14)

7 octobre 2014

"L’instance présidée par Jean-Louis Bianco va commencer des auditions dans la perspective d’un avis qui sera rendu début 2015. Il s’agit d’évaluer d’éventuelles difficultés que posent les régimes dérogatoires à la loi de 1905 en vigueur en Alsace, en Moselle et dans certaines collectivités d’outre-mer.

L’Observatoire de la laïcité s’apprête à ouvrir le délicat dossier des différents régimes cultuels en France. En jeu, la question des règles dérogatoires à la loi de 1905 (l’État ne finance aucun culte) applicables en Alsace, en Moselle et dans certaines collectivités d’outre-mer. À partir du mois de novembre, cette instance présidée par Jean-Louis Bianco va auditionner les élus locaux de ces territoires, des juristes ou représentants des cultes. « L’enjeu est de faire le point sur ce qui s’y passe, d’évaluer d’éventuelles difficultés », explique Nicolas Cadène, le rapporteur général de l’Observatoire, qui remettra ensuite un avis, probablement début 2015.

La dénonciation de la survivance du régime concordataire est un combat de longue date de certains réseaux francs-maçons ou libres-penseurs. Ancien grand maître du Grand Orient de France, Patrick Kessel a été nommé membre de l’Observatoire de la laïcité en tant que président du Comité laïcité République (CLR) qui milite pour la fin de cette dérogation au principe de la séparation de l’Église et de l’État.

En 2013, une association pour la promotion et l’expansion de la laïcité avait tenté sans succès de dénoncer la rémunération publique des ministres du culte alsaciens devant le Conseil constitutionnel. Rejetant cette requête, les sages avaient notamment rappelé que les rédacteurs de la Constitution de 1958 avaient réaffirmé le principe d’une République laïque sans remettre en cause l’existence du régime concordataire [1].

À Strasbourg, le secrétaire général de l’Institut du droit local alsacien-mosellan, Éric Sander, ne cache pas sa perplexité. « Je ne vois pas ce qu’un nouvel avis émanant de cet observatoire peut apporter de plus en matière de laïcité. Le Concordat est un traité international. Pour y toucher, il faudrait renégocier directement avec le Saint-Siège », rappelle-t-il.

Au-delà des considérations juridiques, les Alsaciens y restent très attachés. « Nous espérons que l’Observatoire admettra qu’à côté de la loi de 1905, qui s’applique sur une partie du territoire français, peut exister un autre régime, justifié historiquement, explique le P. Bernard Xibault, chancelier du diocèse de Strasbourg. Le Concordat satisfait la population et contribue sans aucun doute à la paix religieuse qui prévaut dans notre région. »

L’avis de l’observatoire pourrait proposer plus modestement des aménagements techniques. Par exemple, certains demandent de changer les règles pour les cours de religion dans les établissements publics : alors que les familles doivent faire une démarche pour désinscrire leur enfant, ce serait la participation qui résulterait d’une démarche volontaire.

Mais même de tels aménagements à la marge laissent les spécialistes sceptiques. « Ce débat sur le caractère obligatoire de l’enseignement religieux dure depuis vingt ans. La question est plutôt : comment faire pour enseigner des éléments sur la religion musulmane ? Comment fixer le contenu de ces enseignements ? », ajoute Éric Sander.

Si l’Observatoire de la laïcité a pris le risque de rouvrir ce chantier, c’est qu’il lui faut bien donner des gages à ceux qui regrettent un manque d’engagement. Lors d’un rapport publié en juin 2013, Jean-Louis Bianco avait affirmé que la laïcité française n’était pas menacée. Une sérénité qui divise au sein même de l’institution.

Patrick Kessel avait refusé, il y a un an, de voter l’avis sur l’affaire Baby-Loup qui recommandait au législateur de ne pas toucher au code du travail. De même, alors que le député PS Jean Glavany, membre de l’Observatoire, souhaitait que l’instance se saisisse du dossier du port du voile à l’université, celui-ci est finalement resté dans les tiroirs.

Qu’il s’agisse de l’hôpital, du monde éducatif ou même de l’entreprise, les situations de conflits restent marginales selon Jean-Louis Bianco. Un diagnostic qui ne l’empêche pas de déplorer l’ignorance de nos concitoyens sur la liberté religieuse et ses limites. Il donne donc la priorité à un travail de pédagogie, multiplie les visites sur le terrain, la rencontre des acteurs locaux, des fonctionnaires. « Les besoins de formation sont énormes. Les guides pratiques que nous avons publiés (1) répondent à une forte demande », assure le président.

(1) Trois guides sur la laïcité dans les structures socio-éducatives, les collectivités locales et l’entreprise, disponibles sur le site : http://www.gouvernement.fr/observatoire-de-la-laicite "

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