""Charlie" crée la polémique en caricaturant Mahomet" (Le Monde, 20 sept. 12)

21 septembre 2012

"Charlie Hebdo récidive en publiant des caricatures du prophète Mahomet dans son numéro du mercredi 19 septembre. La "une" représente un rabbin poussant un mollah sur un fauteuil roulant avec ce titre : "Intouchables 2". Une page intérieure est consacrée au film islamophobe Innocence of muslims, avec des caricatures de musulmans salafistes.

Les dessins les plus osés se trouvent en dernière page, dans la traditionnelle rubrique "Les couvertures auxquelles vous avez échappé". On y voit un Mahomet les fesses à l’air, prononçant la célèbre réplique de Brigitte Bardot dans Le Mépris, devant un Jean-Luc Godard consterné : "Et mes fesses, tu les aimes, mes fesses ?" Sur un autre dessin, le prophète montre son derrière affublé d’une étoile avec cette légende : "Mahomet : une étoile est née".

Il y a six ans, Charlie Hebdo avait défrayé la chronique en publiant les douze caricatures de Mahomet parues en septembre 2005 dans le quotidien danois Jyllands-Posten. Ce numéro du 8 février 2006 représentait en couverture un Mahomet soupirant : "C’est dur d’être aimé par des cons !" Il avait été tiré à plus de 600 000 exemplaires et rapidement épuisé en kiosques. Les ventes de l’hebdomadaire se situaient d’ordinaire autour de 60 000 exemplaires.

Plusieurs organisations musulmanes dont la Grande Mosquée de Paris et l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) avaient poursuivi l’hebdomadaire en justice. Charlie Hebdo avait été relaxé à l’issue d’un procès très médiatique en 2007.

Les événements ont pris une tournure plus grave l’année dernière, puisque les locaux du journal ont été en partie détruits par un incendie volontaire, le 2 novembre 2011. L’hebdomadaire venait de publier un numéro intitulé Charia hebdo avec un dessin de "Mahomet, rédacteur en chef". Une enquête ouverte par le parquet de Paris et confiée à la police judiciaire n’a, pour l’heure, donné aucun résultat. Les incendiaires n’ont jamais été retrouvés.

Cette fois, les responsables de Charlie se défendent d’avoir voulu réitérer un coup éditorial, comme celui de 2006, ou même comme le "spécial charia" de 2011. Le dessinateur Luz parle même d’un "emballement médiatique". "Ce n’est pas un numéro sur Mahomet, insiste-t-il. Il n’est même pas représenté en "une". Une seule page est consacrée au film Innocence of muslims et deux pages à Bernard Arnault, le patron de LVMH. J’ai l’impression que nos confrères essaient de fabriquer de toutes pièces une deuxième affaire des caricatures. Nous représentons Mahomet dans le journal presque toutes les semaines..." [...]

A l’Elysée, on affirme que la position du chef de l’Etat est "très nette". "En France, la liberté de la presse est totale, elle ne peut être reniée ni même circonscrite, explique un conseiller. On n’est pas libre à 99 % mais à 100 %. Il n’y a aucun débat là-dessus et François Hollande a toujours été très clair sur le sujet."

L’entourage du président rappelle que M. Hollande, alors premier secrétaire du PS, avait témoigné en faveur de Charlie Hebdo, en février 2007, lors du procès de l’hebdomadaire pour la publication de caricatures représentant Mahomet. " Après, la liberté n’empêche pas la responsabilité, et c’est aux journalistes d’apprécier, en conscience, s’il est opportun ou non de publier telle ou telle chose", ajoute l’Elysée qui précise toutefois que, "quoi qu’il en soit, la responsabilité des pouvoirs publics est d’assurer la sécurité des journalistes qui pourraient être inquiétés, d’où la décision de les placer sous surveillance et de prévenir toute manifestation qui pourrait conduire à des dérapages".

Dès mardi, Laurent Fabius, en déplacement au Caire, s’était déclaré contre "toute provocation" tout en soulignant l’existence de la liberté d’expression. Mercredi matin, sur RTL, le premier ministre Jean-Marc Ayrault, a rappelé que ceux qui sont choqués par les dessins de l’hebdomadaire peuvent saisir les tribunaux dans "l’Etat de droit qu’est la France" qui garantit "la liberté de caricature". La veille, M. Ayrault avait exprimé sa "désapprobation", "dans le contexte actuel" face " à tout excès", tout en rappelant, lui aussi, le principe de laïcité. [...]

Film anti-islam : pas d’autorisation de manifester

Jean-Marc Ayrault a annoncé, mercredi 19 septembre sur RTL, le rejet d’une demande de manifester contre le film anti-islam déposée à Paris pour samedi 22 septembre. Des appels à manifester dans les grandes villes de France se multiplient sur les réseaux sociaux. "Nous ne tolérerons pas de débordement", a affirmé le premier ministre. Samedi 15 septembre, une manifestation non déclarée avait réuni environ 250 personnes à proximité de l’ambassade américaine à la suite d’un appel sur les réseaux sociaux. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire, dimanche, pour identifier les organisateurs. Ils encourent six mois de prison et 7 500 euros d’amende."

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