Édito

Henri Caillavet : un "immortel" au service des Lumières (27 fév. 13)

par Patrick Kessel, président du Comité Laïcité République 27 février 2013

Les immortels sont peut-être ceux qui, ne croyant pas à l’immortalité de l’âme, ont consacré leur vie, non à la quête d’une Lumière qui nous tomberait sur la tête, mais des Lumières qu’ils convient chacun à reconquérir et à pousser un peu plus loin.

Henri Caillavet, qui vient de nous quitter dans la quiétude d’une vie bien pleine, heureuse et généreuse, au service d’une humanité en marche vers une émancipation toujours inachevée, était de ceux-là. De ces "justes" qui, contre modes et totalitarismes, ont tenu le cap de la liberté de conscience et de l’égalité entre les femmes et les hommes quelles que soient leurs origines. Le cap de la raison et du progrès pour comprendre toujours mieux le monde et l’homme et mettre cette connaissance toujours au service des idéaux humanistes qui font de l’homme la mesure de l’homme.

Henri Caillavet, l’homme qui, enfant, sauta sur les genoux du Maréchal Foch, résistant de la première heure, représentant du peuple, député, sénateur, ministre, fut d’abord et avant tout un militant des droits de l’homme et de la laïcité mais aussi une avant-garde éclairée du monde qui vient. Juriste de formation, Henri entendait tirer des découvertes scientifique et techniques le meilleur pour l’homme et pour les principes de Liberté et d’Egalité des droits entre tous. Plus il avançait en âge et plus il se passionnait pour cette révolution des biotechnologies, aussi importante pour l’homme, sinon plus, que ne le furent la découverte du feu, de l’agriculture ou de l’écriture. Il savait que l’homme avançait à pas de géants sur la voie de la connaissance de soi et de l’univers et qu’il était essentiel de lui donner à la fois les moyens de contrôler le fruit de ses découvertes tout en s’assurant qu’elles seraient mises au service de cette éthique des Lumières.

Impertinent de l’intelligence, voltairien à l’égard des conservatismes et des obscurantismes qu’il dénonçait avec culture et ironie, il savait, tel l’auteur de Candide et du Dictionnaire philosophique mobiliser ses énergies pour défendre le droit de ceux dont il ne partageait pas la foi à la vivre tranquillement.

Cette éthique dont il répétait que la Laïcité l’incarne et la concrétise, Henri Caillavet en aura fait le combat d’une vie. Ainsi fut-il un des premiers présidents du Comité Laïcité-République, juste après Claude Nicolet, Président fondateur. Il n’hésita pas un instant lorsque, voilà plus de vingt ans, alors que le mouvement laïque tergiversait face à ce qu’il est convenu d’appeler la "première affaire du voile", je lui proposai de créer cette association avec notamment Catherine Kintzler, Elisabeth Badinter, Régis Debray, Alain Finkielkrault, Jean-Pierre Changeux, Pierre Bergé, Louis Astre...

Est-il besoin de rappeler que ce quasi-centenaire témoignait d’une jeunesse d’esprit exceptionnelle, à l’heure où la laïcité constitue plus que jamais l’outil d’un réel vivre-ensemble dans une République déchirée et un enjeu politique décisif ? Un enjeu pour notre République, pour l’Europe et au-delà, tout particulièrement pour ces peuples courageux qui veulent que le printemps arabe ne sombre pas dans l’hiver islamiste.

Henri Caillavet fut un chevalier de cette éthique mais aussi un passeur. Il a transmis. Les nouvelles générations poursuivent son combat dont nous savons tous qu’il sera toujours inachevé.

Il fut un combattant exceptionnel, un intellectuel curieux et courageux, toujours ouvert sur le questionnement, un républicain sans partage, un ami généreux et fidèle, un homme dans toute la beauté de la vie qu’il aima pleinement.

Notre tristesse ce jour nourrira davantage encore notre détermination à poursuivre l’oeuvre inachevée pour une République toujours plus sociale et laïque.

Patrick Kessel
président du Comité Laïcité République


Voir Henri Caillavet (note du CLR).


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