Tribune libre

Ghaleb Bencheikh tel quel : juste quelqu’un de pas bien (K. Slougui)

par Khaled Slougui, consultant formateur, président de l’association Turquoise Freedom. 23 septembre 2019

[Les tribunes libres sont sélectionnées à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

Dans cette tribune, je reprends toutes les positions que j’ai pu afficher sur les réseaux sociaux à propos de la réunion de la Ligue Islamique Mondiale (LIM), et de son initiateur : un Tartuffe que j’ai très tôt repéré, comme ce fut le cas avec Tarik Ramadan, à qui j’ai consacré une tribune similaire.

L’un et l’autre ont impressionné, à tort. Il s’agit d’une vraie usurpation intellectuelle : la forme devient le catalyseur de la pensée, et la façon de dire prends le dessus sur le dire. A ce propos, Pierre Bourdieu a écrit de très belles choses, notamment dans Ce que parler veut dire.
Ces deux compères ont en commun un verbiage stérile mis au service d’une ambition dévorante, bassement mercantile, et qui privilégie les choses de la terre au ciel. Ils ont pour eux une maîtrise incontestable de la parole, un vrai capital dont ils usent et abusent aux fins d’une captation de leur part de la rente théologique. Je reviendrai certainement sur ce sujet de façon plus élaborée ; pour aujourd’hui, je lance en vrac quelques unes de mes réparties sur le sujet.

1 - J’ai signé et appelé à signer la pétition autour de la manifestation de la LIM et de la FIF (Fondation de l’Islam de France) [1]. Plus tard, il serait pertinent de demander a l’Etat la dissolution de la FIF.
Si Bencheikh tient a son islam de France, qu’il s’installe sous le statut de la loi 1901, tout en s’émancipant de la tutelle de l’Etat. Qu’il nous prouve ses convictions en s’investissant dans une association de droit privé bénévolement. Des millions de français le font pour défendre leurs convictions, et j’en fais partie.
Tous au palais Brongniart pour dire non à l’imposture, mais surtout non au sacrifice de l’esprit des Lumières que nous n’avons d’autre choix que de défendre contre vents et marées. Il est question de l’avenir et du devenir à la fois.

2 - Honte à Ghaleb Bencheikh, que j’ai déjà eu l’occasion de critiquer par le passé. Des esprits simples m’avaient alors pris à partie : respecter le fils à papa - après le fils à grand papa (Ramadan). Je persiste et signe.
L’obscurantisme, c’est de se soumettre au wahhabisme comme le fait Ghaleb Bencheikh. C’est de taire les décapitations au royaume saoudien, et le totalitarisme du régime, à nul autre pareil. Ce sont les milliers d’opposants qui croupissent en prison dans des conditions dégradantes, tel Raif Badawi. Mais aussi le génocide qui se commet au Yemen. Ce sieur a une faiblesse : les pétrodollars !

3 - Le wahhabisme qui fonde la doctrine islamiste, c’est probablement l’interprétation la plus pauvre qu’ait jamais connue l’histoire théologique et doctrinale de l’islam, nous précise le lumineux Abdelwahhab Meddeb.
A contrario, ce caméléon nous précise que son ami saoudien est dans une rupture, au sens hégélien du terme, avec le wahhabisme - toujours l’envie d’impressionner.
J’ai été choqué par cette "tambouille" entre le wahhabisme et Hegel.

4 - La première fois que je me suis exprimé à ce sujet, c’est suite à la nomination de Ghaleb Bencheikh à la présidence de la FIF, après le départ de Jean-Pierre Chevènement. Il faut rappeler que la création de cette fondation était une manœuvre politicienne, une ruse de la part de Hollande qui voulait évincer J.-P. Chevènement d’une possible candidature à la présidentielle. L’intérêt d’une telle initiative ne concernait ni l’islam, ni les musulmans, il est très suspect et ce d’autant qu’il n’a pas lieu d’être.
A vrai dire, ce personnage ne m’intéresse pas, et je n’aime ni les héritiers (son père était recteur de la mosquée de Paris, poste qu’il lorgne), ni ceux qui plaisent à tout le monde. Je ne lui fais aucune confiance.
Moi je combats farouchement la représentation des musulmans. Pas lui, surtout s’il est élu.
Il ne s’est jamais opposé aux islamistes frontalement, et n’a jamais décliné leurs invitations à leurs différentes messes, dont celle annuelle du Bourget.
Le vocabulaire recherché qu’il utilise (il s’égosille à pérorer sur la disputatio avec une certaine pusillanimité qu’il ne trouve pas toujours de bon ton...), ce sont ses mots, et une certaine forme d’éloquence viennent combler le manque de consistance. La volubilité, le bagout, la faconde ne sont pas suffisants pour l’éclosion d’une pensée féconde, ai-je dit, à propos de Tarik Ramadan. C’est valable pour lui.
Son jeune frère Soheib est nettement plus percutant et plus clair. Il se donne la liberté de critiquer le pouvoir algérien, et il démolit Ramadan et l’UOIF.
L’Islam de France auquel il tient tant est une imposture, et je m’oppose au principe même de l’existence de cette structure, c’est de l’argent jeté par la fenêtre. L’Etat n’ a pas à s’immiscer dans les affaires de la religion, il n’a pas à financer un culte.
Outre l’idée de l’incurie et de la gabegie de l’Etat que cela illustre, la démarche s’apparente à un déni de citoyenneté pour les "musulmans", elle est antirépublicaine.

5 - Le Tartuffe s’est dévoilé finalement, et derrière l’image de laïcité assumée qu’il est arrivé à vendre, pointe une sorte de cheval de Troie de l’islamisme moyen-âgeux.
Et pour cause ? Il partage fondamentalement l’idée de toilettage de la loi de 1905, qui n’est qu’un subterfuge pour sa remise en cause.
C’est aussi un communautariste invétéré, c’est un fonds de commerce qu’il mobilise pour la question de la représentation des musulmans, d’autant qu’une guerre sourde se mène avec le CFCM, L’UOIF... etc.
Les particularismes sont une véritable obsession pour lui, c’est là qu’il trouve sa clientèle. La république "c’est pas ça", ne lui en déplaise.
C’est surtout quelqu’un qui veut se donner l’air mais qui n’en a pas.

Ecoutons-le :
"Il s’étonne de l’incompétence et de l’incurie du CFCM qui laissent la voie libre à des manœuvriers qui ont prise sur une religion française. On ne peut plus accepter des mouvements contrôlés par l’étranger et qui nous déplaisent.
Nous sommes l’unique instance qui tient la route et qui s’investit dans la transparence la plus totale, dans un esprit républicain".
Conclusion. En catimini, il veut revoir les statuts de la FIF, de sorte à pouvoir bénéficier des financements des monarchies crapuleuses, alors que par ailleurs, il dénonce l’ingérence de pays étrangers (Algérie, Turquie, Maroc...), pour cause de souveraineté nationale.
De cet épisode, sa réputation en sortira ternie, elle en prendra certainement un coup dont il ne se relèvera pas, à l’image de son compère Tarik.
Décidément, l’héritage est un cadeau empoisonné. Dieu m’en a épargné, et je ne m’en plains pas.

Pour paraphraser Enzo Enzo : Oui ! Ce gus est juste "quelqu’un de pas bien".

"Malheur a la nation qui professe de nombreuses croyances, mais ignore la foi", nous a prévenu mon pote Gibran.

Salutations laïques !

Khaled Slougui


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