Revue de presse

“Dix élèves tentent de présenter le bac voilées” (Le Figaro, 23 juin 10)

25 juin 2010

"En raison d’une mauvaise interprétation de la loi, le proviseur les a laissées faire pendant trois jours.

Les candidates venues cette semaine passer leur bac voilées à Créteil mettent un nouveau coup de projecteur sur la loi de mars 2004 portant sur l’interdiction des signes religieux à l’école. Un sujet sensible alors que la loi sur la burqa sera examinée par l’Assemblée à partir du 6 juillet.

Dix jeunes filles, sur un total de 309 candidats, se sont présentées voilées aux épreuves écrites du bac technologique des séries sciences sanitaires et sociales, et gestion, au lycée Gutenberg de Créteil. Trois d’entre elles étaient revêtues d’un niqab et de gants, les sept autres avaient un voile simple. Toutes avaient néanmoins pris la précaution de laisser l’ovale de leur visage apparent pour qu’on les reconnaisse. Certaines auraient demandé à ne pas travailler en compagnie d’hommes et se seraient munies d’un papier notifiant qu’elles avaient « le droit », selon la loi, de composer voilées. Elles ont été autorisées par le proviseur à présenter leurs examens voilées les trois premiers jours, dans une salle isolée des autres candidats.

Choqués, des enseignants ont envoyé une pétition au rectorat. L’affaire les a d’autant plus heurtés que les dix candidates inscrites dans ce même établissement pendant l’année n’avaient jamais porté le voile ! Dans ce lycée qui fait face à une mosquée, une enseignante estime qu’il s’agit de « provocation » de la part des jeunes filles. « C’est une attitude frondeuse. Elles cherchent à tester l’Éducation nationale et ça a fonctionné, car la loi n’est pas claire pour tout le monde. »

Alertés, des membres des équipes mobiles de sécurité du rectorat, envoyés sur place le quatrième jour, les ont convaincues de retirer leur voile. Pour le rectorat, ces jeunes filles n’ont pu commencer leurs examens voilées qu’en raison d’une « mauvaise lecture des textes ».

La circulaire d’application de la loi de mars 2004 est, il est vrai, plutôt com­plexe. Selon cette dernière, datant du 27 mai 2004, « la loi ne s’applique pas aux candidats qui viennent passer les épreuves d’un examen ou d’un concours dans les locaux d’un établissement public d’enseignement et qui ne deviennent pas de ce seul fait des élèves de l’enseignement public. Ceux-ci doivent toutefois se soumettre aux règles d’organisation de l’examen qui visent notamment à garantir le respect de l’ordre (…). » En clair, et selon l’interprétation faite par le ministère de l’Éducation nationale et le rectorat, la loi est différente selon que l’élève était ou non inscrite dans un établissement public pendant l’année.

Les candidates inscrites dans un établissement public n’ont pas l’autorisation de se présenter voilées le jour de l’examen, insiste-t-on, « elles restent en effet élèves de l’enseignement public, même le jour de l’examen ». Seules les jeunes filles passant leur examen en candidate libre ou inscrites dans un établissement privé peuvent passer le bac voilées. Cette disposition concerne pour l’essentiel des filles qui étudient chez elles pour ne pas avoir à retirer leur voile. Toutes doivent cependant respecter « la police des examens », définie dans le Code de l’éducation et qui doit être appliquée « au cas par cas » : le visage doit être apparent et le retrait du foulard peut être demandé en cas de soupçon ou de risque de fraude.

Il peut aussi être interdit pendant le déroulement d’une épreuve lorsqu’il est considéré comme attentatoire à la dignité de la personne ou pour des raisons de sécurité. Tel avait été le cas d’une candidate en 2005 interdite de voile lors d’une épreuve de sport. Pour Michel Richard, secrétaire général adjoint du principal syndicat de proviseurs, le SNPDEN-Unsa, « il faut différencier le statut des élèves et celui des candidats aux examens ». L’Éducation nationale manque, selon lui, de jurisprudence dans ce cas précis. Selon le syndicat, « il faut avant tout pouvoir identifier le candidat. Après, il y a le fait que la présence d’élèves voilées ne doit pas perturber les autres candidats. L’organisation du bac est une prérogative de l’État, neutre et laïque, on peut donc demander une neutralité religieuse dans les centres d’examens. Il est ainsi demandé aux établissements privés de ne pas mettre en avant leurs crucifix dans la salle d’examen, le jour du bac ».

Au ministère, on relativise, même si l’on reconnaît que la circulaire n’est pas « forcément satisfaisante ». « La loi sur la burqa pourrait clarifier les choses », y affirme-t-on. À peine une dizaine de cas similaires sont recensés chaque année en France au moment des examens."

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