Revue de presse

"Assas renonce à une conférence sur le conflit israélo-palestinien" (Le Figaro, 4 mars 20)

17 mars 2020

[Les articles de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"L’annulation de cette intervention, jugée trop « sensible », indigne les invités de ce cycle de rencontres, qui estiment que l’université est « soumise à une pression moralisatrice ».

Par Caroline Beyer

Peut-on encore tenir une conférence sur le thème du conflit israélo-palestinien au sein de l’université française ? Paris-II-Panthéon-Assas a décidé que non. Le 24 février, l’Institut Meydane, organisateur d’une série de conférences sur l’Orient en 2020, reçoit un mail de la direction l’informant que l’intervention traitant du conflit israélo-palestinien, prévue le lendemain, « ne peut être autorisée », en raison du « caractère très sensible » du sujet et du « peu de temps disponible pour évaluer les risques ». Étonnement et indignation des responsables de l’institut orientaliste et des trois professeurs spécialistes de la question qui devaient intervenir.

« Comme pour les autres conférences, nous avions pourtant averti l’université dans les temps », explique Saeid Abedi, étudiant iranien en master droit des affaires, en charge de ce cycle de conférences. Association universitaire implantée à Paris-I, Paris-II, Sciences Po ou encore l’université de Cergy, l’institut Meydane est un cercle de réflexion qui se revendique « apolitique », « non confessionnel » et « non communautaire ». De l’Iran à l’Algérie, en passant par les pétromonarchies du Golfe, les 20 conférences programmées d’octobre à juin ambitionnent de poser les enjeux en Orient, de l’Afrique du Nord à l’Asie centrale.

« Sur le plan des principes, c’est grave »

« Toutes nos conférences abordent des sujets sensibles. C’est la raison pour laquelle nous choisissons soigneusement nos intervenants. L’objectif est d’ouvrir la discussion sans tabou, fait valoir le jeune homme. L’université n’est-elle pas le temple des idées et du débat ? Pourquoi priver les étudiants de cela ? »

« Sur le plan des principes, c’est grave. Si on ne peut plus débattre à l’université, où peut-on le faire ? » s’indigne Jean-Paul Chagnollaud, professeur de science politique et directeur de l’Institut de recherches et d’études Méditerranée Moyen-Orient. Il devait intervenir, le 25 février, aux côtés de Jean-Claude Lescure, historien, et Emmanuel Dupuy, président de l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE). « Si le sujet est jugé trop sensible, il faut prendre des mesures de précaution », poursuit cet ancien doyen de la faculté de droit de Cergy. À l’annonce de l’annulation de la conférence, il a aussitôt contacté la direction de l’université. Il ne s’agit « pas uniquement d’un sujet sociétal qui peut agacer quelques personnes », lui répond celle-ci, mais d’« un sujet sur deux pays en guerre depuis soixante-dix ans ». Et de conclure à un « risque d’incidents violents ».

Pression, ou autocensure ? À Paris-Assas, où l’on ne commente pas, les associations étudiantes ne se sont pas mobilisées pour exiger une quelconque annulation. « L’université est sur ses gardes par rapport à ce sujet complexe, et je la comprends », estime Ismaël Zniber, président de la fédération des associations d’Assas et ancien président de l’association Assas Monde arabe. « Nous nous interdisions d’aborder le conflit israélo-palestinien. Je considère que le débat est saturé et qu’il ne faut pas échauffer les esprits », ajoute-t-il. « Le contexte est délétère. L’université est soumise à une pression moralisatrice », assène Emmanuel Dupuy, avant d’évoquer la conférence internationale sur le terrorisme, initialement prévue en novembre à l’université de la Sorbonne et délocalisée à l’École militaire, car jugée trop dangereuse. « Il a fallu trouver un lieu “neutre”. Et ce n’est plus l’université », s’émeut-il.

Dans un autre registre, c’est une conférence de la philosophe Sylviane Agacinsky qui avait été annulée en octobre par l’université de Bordeaux, des associations LGBT dénonçant alors la venue d’une « homophobe notoire pour parler PMA et GPA ».

D’Alain Finkielkraut à François Hollande, l’interdiction d’accès à l’université par une minorité de militants devient monnaie courante. La partie a failli se rejouer mardi à Sciences Po Lille, où le député européen conservateur François-Xavier Bellamy était programmé. Dans une lettre ouverte au directeur, un collectif d’associations accuse le député LR d’avoir tenu « des propos et actes à visée discriminatoire ». Mais Pierre Mathiot a tenu bon face à cette trentaine de militants d’extrême gauche, « toujours les mêmes, une secte qui fait la police de la pensée ». À la même heure que le député se tenait dans une salle voisine une conférence de Françoise Vergès sur le féminisme décolonial. « C’est cela la liberté d’expression », explique Pierre Mathiot."

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