Revue de presse

"À Sciences Po, le wokisme s’invite dans la danse" (Le Figaro, 21 déc. 22)

22 décembre 2022

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

"Sommée par la direction de l’école d’utiliser les termes « leader » et « follower » au lieu de « homme » et « femme » pour désigner les partenaires, une professeur de danse de l’IEP parisien a choisi de claquer la porte. Sciences Po, de son côté, évoque des propos déplacés de l’enseignante à certains élèves.

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[...] En juillet 2022, l’administration de Sciences Po modifie la nomenclature de huit cours de danse de salon. Lors des inscriptions, les élèves doivent désormais opter pour les mentions « leader » et « follower » au lieu des termes « homme » et « femme ». « Le rôle du leader est de guider la danse », « le rôle du follower est de suivre la danse », précise l’école. Le semestre d’automne 2022-2023 commence et début octobre, des élèves de Valérie P. font remonter à l’administration des propos que Sciences Po qualifie de « non adaptés ». « Je me souviens d’un jour, en septembre, où la prof a fait allusion à la gifle d’Adrien Quatennens. Elle nous apprenait à faire tourner son partenaire. Elle nous a dit de faire attention à ne pas faire de mouvement brusque en ajoutant : “On ne sait pas où une claque peut mener” », raconte Aurélie*, 20 ans, qui assistait aux cours de l’enseignante chaque mardi matin. [...]

L’administration prend les accusations des étudiants très au sérieux. Après un échange téléphonique le 20 octobre, la responsable de l’Association sportive (AS) envoie le 15 novembre à Valérie P. un mail que Le Figaro a pu consulter. Elle lui rappelle que « les propos à caractère discriminatoire ou perçus comme tels notamment liés à l’orientation sexuelle n’ont pas leur place dans les activités que nous proposons à nos étudiant.e.s, notamment au titre de la charte de déontologie qui s’applique à tous les titulaires de fonction dans notre IEP. Comme vous le savez, notre établissement prône des valeurs d’inclusion et de non-discrimination qu’enseignant.e.s et étudiant.e.s se doivent de respecter ».

Un discours dans la ligne de la direction, qui « s’engage contre toutes les formes de discriminations », comme elle le rappelle d’ailleurs dans un communiqué envoyé le 8 décembre. À noter que sur la forme, toutefois, l’utilisation de l’écriture inclusive va à l’encontre des déclarations du directeur Mathias Vicherat, qui, sur CNews le 12 décembre, expliquait que cette typographie n’avait pas sa place à l’IEP. « Il n’y a aucun document officiel de Sciences Po qui doit comporter de l’écriture inclusive. Quand j’écris, je n’utilise jamais l’écriture inclusive. Sur le site de Sciences Po, il n’y a pas d’écriture inclusive. Nous avons une ligne très nette », a-t-il ainsi assuré. Dans la suite de cet e-mail, la responsable de l’AS informe Valérie P. que les maquettes porteront désormais les informations suivantes : « follower - tous niveaux » et « leader - tous niveaux ».

« Les couples seront constitués sur la base du statut de leader-follower et non selon le genre ou sexe des participants », est-il spécifié. Une nomenclature à laquelle s’oppose l’enseignante, répond-elle dans un message du 22 novembre. Le lendemain, le directeur de la vie de campus et de l’engagement assure à Valérie P. que s’il « entend ses remarques », il ne peut « y répondre favorablement », et demande à son interlocutrice de « confirmer d’ici à début décembre (son) souhait de renouveler (son) engagement ». Ce à quoi l’enseignante répond le jour même : « Avec beaucoup de regret mais conformément à ma volonté de préserver mon Art, mon enseignement, et ma liberté d’aimer une discipline existante qu’on souhaite dénaturer, je ne serai pas votre professeur de danse au second semestre. » [...]

Les appellations « leader » et « follower » sont-elles vraiment utilisées dans le milieu de la danse ? « Oui, notamment dans le milieu du tango argentin », répond Laura Cappelle, journaliste et sociologue, qui a dirigé l’ouvrage collectif Nouvelle Histoire de la danse en Occident (Seuil, 2020). « Dans les milongas (endroit où l’on danse le tango, NDLR) du monde entier, on trouve un nombre conséquent de femmes qui ont appris le rôle de leader et d’hommes qui ont appris celui de follower, par intérêt notamment pour les défis techniques différents qu’ils posent », explique-t-elle. Si Christophe Clauzel, premier vice-président de la Fédération française de danse, confirme que ces dénominations peuvent être utilisées dans certaines danses, il souligne toutefois que « dans les règlements qui régissent nos danses de compétition, nous n’utilisons pas les termes “leader” et “follower” mais “homme” et “femme” ». Avant d’ajouter : « Nous n’employons que des mots d’origine française. »

« Dans les ouvrages qui définissent les codes de la danse, les pas sont décrits en utilisant les termes “femme” et “homme”. En tant qu’enseignante, je me dois d’apprendre à mes étudiants ce qui est codifié et écrit », déclare Valérie P. « Utiliser “leader” et “follower”, c’est considérer qu’il y a une notion de soumission entre les deux rôles, ce qui n’est pas du tout le cas. Moi, je suis une femme, pas une followeuse. J’existe. De plus, je n’utiliserais pas un tel anglicisme », souligne-t-elle, en ajoutant qu’elle n’a rien contre les danses entre deux individus de même sexe. « Une discipline dite “same sex” est apparue ces dernières années. Mais ce n’est pas celle que j’enseigne et pour laquelle j’ai été recrutée. Chacun sa sensibilité, chacun est libre, je respecte. Ce que j’aime dans la danse de salon, c’est la complémentarité de deux corps différents », avance-t-elle. Avant d’ajouter : « Je suis désolée, mais une femme de 1,50 m ne peut pas faire le porté de Patrick Swayze dans “Dirty Dancing” ». Une position acceptée par la Fédération française de danse. « Considérer que techniquement, sportivement, une femme ne peut pas faire exactement la même chose qu’un homme, c’est un choix professionnel tout à fait respectable, qui relève de la liberté pédagogique de chaque enseignant », commente Christophe Clauzel. [...]"

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