Revue de presse

"Touche pas à mon pote le Sultan !" (J. Dion, Marianne, 1er juin 18)

21 juin 2018

"Si, par hypothèse funeste, des fans de Poutine s’attaquaient à un kiosque à journaux sous prétexte d’un titre critique à son égard, on friserait la crise diplomatique. On y verrait une nouvelle preuve de l’ingérence russe mise en scène par certains avec un luxe de détails. Il y aurait de l’expulsion de diplomates dans l’air et des déclarations fracassantes dans la presse.

Quand des janissaires d’Erdogan somment un marchand de journaux de retirer la couverture du Point dénonçant (avec raison) un « dictateur » nommé Erdogan, le ton n’est pas le même. Certes, des voix autorisées ont dénoncé le coup de force contre la liberté de la presse. C’était bien le moins. Mais rien de plus. A la différence de la Russie, la Turquie a droit d’office à un régime de faveur et à une compréhension interdite à d’autres.

Son président peut se permettre des attaques à répétition contre la démocratie sans (trop) altérer son image internationale, et sans conduire ses alliés déclarés à taper du poing sur la table. Erdogan serait-il intouchable ?

Dans la perspective des élections du 24 juin, le sultan se prend pour Aladin sur son tapis volant. Il se permet des incartades que nul autre chef d’Etat ne pourrait assumer sans bronca généralisée. Il continue de parler aux dirigeants européens avec morgue et condescendance. A l’occasion, il n’hésite pas à évoquer l’éventuelle adhésion de son pays à l’Union européenne, comme si sa Turquie pouvait se réclamer des valeurs officiellement défendues par Bruxelles (même si, dans la réalité, c’est une autre paire de manches).

Ainsi faudrait-il passer par profits et pertes la répression enclenchée par le régime islamo-conservateur en place à Ankara, sous prétexte de répondre à un prétendu coup d’Etat tombé à pic. Rappelons-en le bilan : 100 000 fonctionnaires limogés, dont 30 000 enseignants ; plusieurs dizaines d’officiers et 7 600 soldats suspendus ; des journalistes embastillés à la chaîne ; l’arbitraire érigé en loi suprême ; le Parlement aux ordres ; le monde judiciaire placé en résidence surveillée. Qui dit mieux ? [...]

La seule vraie question est celle-ci : que doit faire Recep Erdogan pour que l’Europe se décide enfin à prendre des sanctions contre la Turquie et à aider les démocrates turcs ? [...]"

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