“Nations Unies ou « Nations désUnies » ?” (Malka Marcovich, “Café lecture”, Clermont-Ferrand, 30 oct. 10)

2 novembre 2010

Historienne, consultante internationale, vice-présidente du Comité Laïcité République, grande connaisseuse des arcanes de l’ONU, Malka Marcovich dresse un réquisitoire sans concession contre les dérives de l’ONU, au travers de son dernier livre : Les Nations désUnies, comment l’ONU enterre les droits de l’homme (éd. Jacob Duvernet 2009). Elle était l’invitée du Café-lecture Les Augustes pour une conférence-débat à bâtons rompus.

Réquisitoire contre les dérives

En 1945 : après l’échec de la Société des Nations dans sa mission de prévention d’une nouvelle guerre, l’ONU naît sur les cendres de la Seconde Guerre Mondiale, portée par une cinquantaine de pays en guerre contre les puissances de l’Axe.

Trois ans plus tard, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme est adoptée. Mais l’unanimité n’est déjà pas de mise. Sur les 58 pays participant à l’assemblée générale des Nations Unies à Paris, une dizaine d’états s’abstiennent. Parmi eux, l’Afrique du Sud réfute le droit à l’égalité sans distinction de race ou de naissance, quelques pays du Bloc de l’est, dont la Russie, ne veulent pas du principe d’universalité, enfin, l’Arabie Saoudite conteste l’égalité homme femme.

Pour Malka Marcovich, c’est là l’un des principaux points faibles de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme : elle ne comprend aucune définition de la Démocratie.

Pour une organisation dont l’essentiel du travail consiste à produire des normes internationales, ce manque de rigueur laisse place à toutes les interprétations de la part d’états avant tout soucieux de leurs propres intérêts.

Malgré tout, le texte et l’organisation sont porteurs d’espoirs. Une certaine euphorie régnera même jusqu’au tournant des années 90, avec des moments forts comme la fin de l’empire soviétique, la disparition de l’apartheid ou les accords d’Oslo.

Cependant, l’universalité des Droits de l’Homme fait déjà l’objet de sérieuses remises en cause. En 2001, la Conférence de Durban contre le racisme, dans le pays de Nelson Mandela, à laquelle assiste Malka Marcovich, est entachée de débordements racistes, antisémites et sexistes, de la part même des organisations non gouvernementales censées combattre ces dérives. Les débats s’achèveront dans la confusion des attentats du 11 septembre 2001…

Pour Malka Marcovich, ce renversement de situation constitue le prolongement prévisible des manquements précédemment évoqués, auxquels s’ajoutent d’autres événements, comme l’adoption, en 1990, de la Déclaration Islamique des Droits de l’Homme, par laquelle les pays musulmans réaffirment la primauté du Coran, ou l’intervention du président Khatami à la conférence du mouvement des pays non alignés, en 1998 au Caire, tendant à ce que le terrorisme soit reconnu comme légitime en cas d’occupation étrangère ou d’attaque contre la religion. À ce stade, Malka Marcovich dénonce la passivité des démocraties occidentales.

Du soutien discret de diverses dictatures à la vente d’armes, rien n’a été fait par les puissances occidentales pour enrayer cette dérive communautaire.

Le réveil économique de la Russie et de la Chine ne fait que renforcer les limitations à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Quant aux pays musulmans radicaux, leur influence s’est renforcée. À tel point que, selon elle, « l’ONU ne mène plus aujourd’hui qu’une diplomatie de façade, servant de couverture à des desseins beaucoup plus hégémoniques de la part de puissances non démocratiques ».


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