Revue de presse

"Mahsa Amini : Fashion victim" (Riss, Charlie Hebdo, 21 sept. 22)

Riss, directeur de "Charlie Hebdo". 21 septembre 2022

[Les éléments de la revue de presse sont sélectionnés à titre informatif et ne reflètent pas nécessairement la position du Comité Laïcité République.]

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Lire "Mahsa Amini : Fashion victim".

"Vendredi dernier, Mahsa Amini, une Iranienne de 22 ans, est morte à l’hôpital après son arrestation par la police des mœurs de Téhéran. Les images de la vidéosurveillance la montrent s’effon­drant dans un commissariat, victime d’une attaque cardiaque ou cérébrale, si on en croit les dernières informations. Sur les réseaux sociaux, on la voit malmenée pendant son arrestation, jetée à terre et finalement poussée contre sa volonté dans un véhicule de la police des mœurs. Tout ça parce qu’elle ne portait pas le voile, obligatoire dans un lieu public en Iran. Les autorités ont ouvert une enquête, dont on peut prévoir qu’elle blanchira les policiers.

Il existe donc encore aujourd’hui dans le monde une police dont le boulot est de vérifier si les gens, surtout les femmes, respectent les bonnes mœurs, telles qu’elles sont définies par la morale officielle. Quand en France, la loi qui réglemente le port du voile dans les lieux publics fut votée, il y eut des voix pour s’en indigner. À les entendre, la France devenait une dictature laïque qui empêchait les femmes de porter librement le voile islamique. Mais a-t-on entendu ces mêmes voix dénoncer l’arrestation et la mort de Mahsa Amini, coupable de ne pas avoir porté ce même voile  ? Bien sûr que non. Ce n’est donc pas la liberté des femmes que ces partisans du port du voile en France défendent. La liberté des femmes, ils s’en foutent royalement. Non, ce qu’ils défendent, c’est un projet de société soumis à des interdits puisés dans l’islam.

Cette police des mœurs iranienne devrait être inscrite sur la liste des organisations criminelles terroristes. Car son but n’est pas d’assurer l’ordre public et la sécurité des citoyens, mais d’entretenir la peur et la soumission de millions de femmes et d’hommes. L’image la plus choquante est probablement celle, au moment de son arrestation, où une femme entièrement voilée semble arracher à Mahsa Amini ses vêtements, visiblement trop décontractés à son goût. Geste atroce que celui d’une femme qui a besoin d’un bouc émissaire sur lequel passer sa trouille non avouée de tomber sous les coups de cette police des mœurs. Il n’y a rien de pire que le zèle de celui qui oblige les autres à être aussi soumis que lui.

L’histoire du voile n’est pas terminée. On a souvent voulu le faire passer, quel que soit son type (hijab, tchador, burqa, niqab), pour un simple attribut vestimentaire au même titre qu’un nœud papillon ou un canotier. On voit parfois des femmes qui ont recouvert leur tête d’un fichu qui s’arrête à la racine des cheveux, et laisse donc visibles les oreilles, le front et la nuque. Un peu à la manière des charlottes ou des bonnets de bain. Pourquoi pas. Mais le voile islamique ne peut pas se contenter d’envelopper les cheveux et de laisser la chair des femmes visible, il doit rétrécir le visage en l’encerclant d’un tissu, car il est la manifestation d’une idéologie religieuse qui entend faire de même à toute la société : réduire ses libertés d’agir et de penser. Ne rien laisser voir au-delà du visage, comme ne rien penser au-delà du Coran.

« La mode, c’est ce qui se démode », avait dit Cocteau. Si le voile islamique n’était qu’un banal vêtement, il se serait démodé depuis longtemps, car il faut dire que c’est un attribut assez moche. Le voile n’a rien à voir avec les fringues, car il est un outil de propagande politique, le signe extérieur d’une religion qui veut, en l’imposant à tous, étendre son emprise sur les individus et la société. C’est ce que probablement Mahsa Amini n’a pas accepté, comme les millions d’autres femmes iraniennes qui supportent de moins en moins cette police des mœurs. Car, derrière l’obéissance aux contraintes de la loi islamique, vestimentaires ou autres, c’est la soumission à toute forme d’autorité, religieuse mais aussi politique, qui est exigée de tous. Un voile jeté sur toute une société comme une camisole passée à chaque citoyen."



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