Revue de presse

Guy Konopnicki : "Qualité France" (Marianne, 27 juil. 13)

5 août 2013

"[...] Denys de La Patellière, réalisateur de ce fameux Taxi pour Tobrouk, vient de nous quitter.

Naturellement, tout le monde reconnaît aujourd’hui que Denys de La Patellière avait découvert Lino Ventura dans le Taxi et dans le Bateau d’Emile, où il jouait avec une autre débutante, Annie Girardot. Les films de Denys de La Patellière sont des classiques. Des dialogues de Michel Audiard servis par de grands acteurs, des adaptations de Simenon ou de Druon...

Ce cinéma a été brocardé, fort injustement, par les épigones de la nouvelle vague, qui avaient donné un sens péjoratif à l’expression « qualité France ». Denys de La Patellière souffrait d’être traité ainsi en « réac », parce que son cinéma, né des lendemains de la Libération, n’adoptait pas les principes proclamés par les Cahiers du cinéma.

En vérité, les auteurs de la nouvelle vague, François Truffaut en tête, s’étaient rapidement écartés de leurs propres dogmes. Mais ceux qui avaient eu le malheur de les précéder sur les écrans devaient passer pour des raseurs archaïques, attachés à cette maudite qualité France, avec ses dialogues littéraires et ses acteurs trop populaires. Le snobisme imposait un impératif catégorique : mépriser Jean-Paul Le Chanois, Christian-Jaque, Georges Lautner et Denys de La Patellière.

Plus les critiques se situaient à gauche, plus ils méprisaient le cinéma populaire. Dans les Grandes Familles et dans le Bateau d’Emile, Denys de La Patellière avait osé représenter la grande bourgeoisie, et même la lutte des classes. C’était donc suspect. Lui-même issu d’une grande famille, véritable descendant d’un fameux chef vendéen, il n’avait pas accepté la trahison de 1940. Depuis lors, ce « réac » se situait résolument à gauche.

Son cinéma qui n’adoptait pas les canons des avant-gardes demeure des plus subversifs ! Dans les Grandes Familles, Gabin et Brasseur s’affrontent à la Bourse, provoquant la mort par goût de l’argent et de la puissance. Aujourd’hui, cette séquence rythme la globalisation de l’économie. Denys de La Patellière ne se prétendait pas visionnaire, il faisait seulement du cinéma."

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