Revue de presse

E. Badinter : "Banaliser l’image de la femme voilée, c’est l’ériger en norme" (lemonde.fr , 28 mars 13)

29 mars 2013

"Il faut donc légiférer afin d’éviter la surenchère, les pressions, les menaces de groupes islamistes, certes minoritaires, mais très influents. Il y a un vide juridique qu’il faut combler. Une crèche peut être religieuse et totalement privée. Les parents qui en font le choix sont souverains. Mais à partir du moment où l’établissement reçoit des aides publiques, il doit respecter le principe de neutralité, de laïcité et d’égalité.

Faut-il étendre la loi de 2004 pour que le voile soit interdit dans les crèches et établissements scolaires subventionnés ?

Nous avons attendu quatorze ans depuis l’affaire du collège de Creil, en 1989 [1], au sein duquel des jeunes filles voilées n’avaient pu être exclues de l’établissement, pour qu’une loi interdise les signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires ; puis, que la loi contre le port du voile intégral et la dissimulation du visage dans l’espace public soit finalement votée en 2010.

Malgré quelques provocations, cette loi a montré son efficacité, ses vertus apaisantes. Espérons qu’il ne faille pas attendre si longtemps pour l’étendre au secteur privé, surtout aux entreprises qui sont au service de l’enfance et de la petite enfance.

Quelles sont les raisons qui vous conduisent à penser qu’une femme voilée ne pourrait pas correctement s’occuper d’enfants, ou que ceux-ci seraient perturbés par son image et sa fréquentation ?

Certes, une femme voilée peut parfaitement s’occuper d’enfants comme une autre. Le problème n’est pas là. A la maison, les mères font ce qu’elles veulent. Mais la crèche est un lieu où se côtoient des enfants de toutes origines, venant de familles, de religions différentes, ou athées. La neutralité s’impose pour n’influencer ni stigmatiser aucun d’eux.

J’ajoute que le principe de l’égalité des sexes est aussi important que celui de laïcité. Or des enfants qui ne côtoient que des femmes voilées risquent de se construire avec l’idée qu’une femme musulmane l’est nécessairement. Ce qui est faux. L’accompagnatrice, l’éducatrice, la puéricultrice ou l’assistante maternelle voilée peut devenir une image structurante, un modèle, un symbole, une représentation partiale de l’image de la femme. La banaliser, c’est l’ériger en norme. [...]"

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