Revue de presse

"Cinq choses à savoir sur la laïcité au travail" (lepoint.fr , 26 déc. 13)

26 décembre 2013

"L’Observatoire de la laïcité a publié un guide à destination des entreprises pour éclaircir la place et les limites de la religion au travail. Salutaire.

"Il n’y a pas besoin d’une nouvelle loi sur la laïcité. Par contre, beaucoup de gens sont un peu perdus", estime Jean-Louis Bianco, président de l’Observatoire de la laïcité. "Les gens restent attachés aux deux principes de base.
Celui de la liberté de chacun de croire ou de ne pas croire, d’exprimer ses convictions religieuses ou philosophiques, dans la limite où cela n’entrave pas les libertés du voisin.
Et d’autre part la neutralité et l’indépendance de l’État", poursuit-il.
L’Observatoire de la laïcité vient de publier un guide pratique intitulé "La gestion du fait religieux dans l’entreprise privée". Que peut-on faire ou ne pas faire ? Quels sont les interdits posés par la religion et comment s’accommode-t-elle du monde de l’entreprise ? Le Point.fr vous propose d’y répondre en 5 points.

1. Religion et offre d’emploi ne font pas bon ménage

C’est le Code du travail qui l’affirme : "Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement [...] en raison de ses convictions religieuses" (article L. 1132-1). En clair : aucune offre d’emploi ne peut comporter de référence à la religion. Lors de l’entretien d’embauche, l’employeur n’a pas non plus le droit d’interroger un candidat sur ce sujet. En revanche, "il n’est pas interdit à un candidat de participer à un recrutement avec un signe religieux", explique le guide de l’Observatoire de la laïcité. Illustration du phénomène : en juin dernier, le patron juif d’une petite entreprise de Montreuil a été condamné à 5 000 euros d’amende par le tribunal correctionnel de Bobigny. Sur l’annonce qu’il avait publiée sur Pôle emploi, il précisait qu’il ne voulait pas "par précaution" de candidats maghrébins "afin d’éviter les tensions".

2. En matière de religion, le client n’est pas roi

Les clients ou d’autres travailleurs de l’entreprise exigent que leurs collègues aient la même religion qu’eux ? Ils n’en ont évidemment pas le droit ! Dans les années 90, le Royaume-Uni justifiait l’exclusion systématique des homosexuels de l’armée par l’homophobie régnant au sein du corps militaire. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), dans l’arrêt Smith and Grady rendu en 1999, a considéré que les attitudes homophobes au sein de l’armée correspondent aux préjugés d’une majorité hétérosexuelle. Et qu’elles ne peuvent donc pas justifier une exclusion. Cette jurisprudence de la CEDH est également valable pour les discriminations religieuses. "La volonté de répondre à la préférence discriminatoire des clients ou d’autres travailleurs ne peut pas être acceptée comme objectif légitime", note la Cour.

En revanche, certains intérêts commerciaux peuvent justifier des restrictions. Certes, l’entreprise ne peut pas se réclamer d’une "image de neutralité" pour demander au salarié de porter une "tenue neutre". Mais le contact avec la clientèle oblige parfois à des interdictions. En 1997, la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion a admis le licenciement d’une vendeuse d’articles de mode féminins, car elle portait un voile islamique et ne reflétait donc pas l’image que la société souhaitait donner d’elle.

3. Lorsque pratiquer son culte entraîne un danger

Des limites à la liberté de manifester ses convictions existent s’il y a un risque pour la sécurité au travail. C’est par exemple l’hypothèse d’un maçon qui refuserait de porter un casque de protection sur un chantier au motif que ses convictions religieuses lui interdisent de se couper les cheveux. Ce peut être également un machiniste qui "refuse de tailler ou de protéger sa barbe" ou encore d’un chimiste qui "refuse d’ôter son foulard", explique l’Observatoire de la laïcité. [...]

4. Quand la religion empêche le bon fonctionnement de l’entreprise

L’organisation du travail implique parfois d’importantes restrictions. L’employé est alors tenu de se conformer à la grille horaire qui lui est imposée, mais également aux lieux de travail et aux techniques professionnelles utilisées. Si l’uniforme est obligatoire, aucune dérogation ne sera possible. C’est l’hypothèse où un salarié d’une boucherie refuserait d’être en contact avec du porc, ou encore si un homme refusait d’être sous l’autorité d’une femme au nom de ses convictions religieuses. Des restrictions sont également possibles lorsque les cultes de chacun empêchent les salariés d’être traités de la même façon, entraînant par là même une inégalité des conditions de travail. Dans un arrêt de 1981, la Cour de cassation a jugé que l’employeur peut refuser des demandes d’absences liées aux fêtes religieuses si la présence de l’employé est impérative à la bonne marche de l’entreprise.

5. Mieux vaut ne pas trop parler religion au boulot

Les salariés peuvent avoir entre eux des discussions religieuses. De la même façon, ils peuvent, tant que l’organisation du travail le permet, porter certains vêtements (foulard, kippa, turban...). Mais ils ne peuvent pas faire de prosélytisme ou exercer de pression sur leurs collègues visant à les convertir ou à adopter un culte particulier. [...]"

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