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“Faire vivre la loi de 1905” (26 oct. 06)

novembre 2006

Le rapport sur la laïcité remis au Ministre de l’Intérieur Nicolas SARKOZY le 21 septembre est tout à fait surprenant tant les conclusions de la commission présidée par le Professeur MACHELON semblent taillées sur mesure pour satisfaire les exigences professées méthodiquement par les adeptes de la révision de la loi de 1905 et de la remise en cause de l’un des fondements historiques de notre Etat républicain et laïc :

  • Possibilité pour les communes de subventionner directement la construction de lieux de culte sur leur sol
  • Incitation faite aux cultes à saisir la justice en cas de difficultés à s’implanter dans certaines communes
  • Mise en doute de la portée constitutionnelle de l’article 2 de la loi de 1905, qui dispose que « la République ne reconnaît, ne salarie et ne subventionne aucun culte »
  • Mise à mal de l’article 19 de la loi de 1905 en encourageant les associations à objet cultuel (lois de 1905) qui le souhaitent à se transformer, sans incidence fiscale, en associations culturelles (loi de 1901). Ainsi, les associations cultuelles n’auraient plus exclusivement à financer l’exercice d’un culte et seraient en capacité de financer des associations culturelles.
  • Création d’une forme particulière de reconnaissance d’utilité publique pour les activités religieuses

Si elles devaient être suivies d’effet, ces recommandations saperaient les fondements de la loi de 1905 notamment en introduisant le financement public sans plafonnement des lieux de culte et la banalisation des associations cultuelles.

La loi de 1905 affirme que la séparation des églises et de l’Etat résulte de la liberté de conscience qui est le socle de nos libertés. Le « toilettage » de la loi de 1905 - tel qu’il est proposé - porte essentiellement sur deux articles « verrous » de l’étanchéité des rapports entre l’Etat et les cultes : l’article 2 qui dispose que « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte » et l’article 19 qui définit le régime très spécifique des associations cultuelles pour bien les distinguer des associations de la loi 1901 et précise qu’elles « ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l’État, des départements ou des communes ».

La commission préconise que les associations cultuelles puissent exercer des activités sociales, culturelles et même obtenir la « reconnaissance d’utilité publique » !

La volonté d’utiliser les collectivités territoriales pour faire sauter le verrou du financement des cultes, au sens large du terme est en contradiction totale avec l’article 2 de la loi de 1905. Cela ferait évoluer notre système vers la délégation de la solidarité, de l’éducation, de la santé, etc. vers les communautés religieuses à la façon anglo-saxonne.

Sous prétexte d’assurer l’égalité des cultes, la commission Machelon propose que la République mette le nez dans les affaires des cultes. En faisant cela nous affaiblirions la République. Les préconisations de ladite commission déboucheraient sur l’établissement d’une citoyenneté à deux vitesses, ceux dont la croyance serait financée par les deniers publics et les incroyants qui seraient contraints de financer des choix individuels relevant exclusivement de la sphère privée.

Sur quelles bases les pouvoirs publics éliraient-ils les cultes méritant des financements. Ils n’ont aucun moyen de vérifier les chiffres de fidèles affichés par les différentes églises. Comment les pouvoirs publics choisiraient-ils entre les différents courants au sein des religions ? La République ne doit pas mettre le doigt dans cet engrenage infernal et dangereux. Sombre perspective, d’autant que les mouvements sectaires à prétention religieuse s’engouffreraient dans la brèche sans coup férir !

Il suffit d’appliquer la loi, avec cohérence.

La laïcité est un des fondements de notre pacte républicain. Elle appartient à notre patrimoine national. Elle ne doit pas devenir un objet de confrontation politicienne. Le rapport Machelon démontre qu’elle et ne doit jamais être considérée comme définitivement acquise.

Ainsi que l’écrit Régis Debray : « La laïcité n’est pas une option spirituelle parmi d’autres, elle est ce qui rend possible leur coexistence, car ce qui est commun en droit à tous les hommes doit avoir le pas sur ce qui les sépare en fait. »

En réalité, la laïcité est la règle commune de la tolérance et de notre vouloir vivre ensemble au-delà de toute croyance ! Ce serait pure folie que de la remettre en cause.

Le 26 octobre 2006

Pierre ALBERTINI (député apparenté UDF de Seine-Maritime), Christian BATAILLE (député PS du Nord), Jean-Pierre BRARD (député apparenté PC de Seine-Saint-Denis), Michel CHARZAT (député PS de Paris), Martine DAVID (députée PS du Rhône), Nicolas DUPONT-AIGNAN (député UMP de l’Essonne), Jacques DESALLANGRE (député apparenté PC de l’Aisne), Muguette JACQUAINT (députée PC de Seine-Saint-Denis), Maurice LEROY (député UDF du Loir-et-Cher), Lionnel LUCA (député UMP des Alpes-Maritimes), Jacques MYARD (député UMP des Yvelines), Robert PANDRAUD (député UMP de Seine-Saint-Denis), Nicolas PERRUCHOT (député UDF du Loir-et-Cher), Rudy SALLES (député UDF des Alpes-Maritimes), Jean-Claude SANDRIER (député PC du Cher), Philippe VUILQUE (député PS des Ardennes).



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